Cession de titres de sociétés et déduction des frais: gare aux pièges fiscaux
Lors d’une cession de titres de participation, la société cédante expose des frais (frais d’intermédiaire, frais de conseils, frais d’évaluation) qu’elle souhaite pouvoir déduire en tant que charge de son résultat imposable.
1. Impôt sur les sociétés
Le Conseil d’Etat (arrêts SOFIGE du 21/06/1995 et min c/Weil Besançon du 07/02/2007) a précisé les modalités de déduction des frais exposés lors de la cession en distinguant deux catégories de frais :
– Les dépenses préparatoires
Il s’agit des dépenses ayant pour objet de préparer la vente dont la conclusion peut ne pas aboutir.
Par exemple, pour le Conseil d’Etat (arrêt SOFIGE) les frais d’évaluation d’une société dont la cession est envisagée sont constitutifs d’une dépense préparatoire et déductibles en intégralité du résultat imposable sous réserve qu’elles n’entrainent pas une augmentation d’actif.
-Les dépenses inhérentes à la cession
Il s’agit des dépenses ayant pour objet d’assurer la conclusion de la vente.
Par exemple, selon le Conseil d’Etat (arrêt min c/ Weil Besançon), les sommes versées à deux intermédiaires ayant pour mission d’assurer la vente constituent des dépenses inhérentes à la cession.
Les dépenses inhérentes à la cession sont déductibles uniquement du prix de cession des titres vendus et doivent être exclues des charges d’exploitation de l’entreprise cédante.
Pour éviter toute remise en cause ultérieure des déductions, il appartient au Cédant de procéder à la ventilation des frais exposés entre dépenses préparatoires et dépenses inhérentes à la cession sur la base des documents transmis par les conseils et des opérations effectuées.
Lesdits documents devront être les plus précis possibles et être conservés pendant toute la durée du délai de reprise pour justifier des déductions effectuées et éviter toute remise en cause.
2.TVA
S’agissant de la TVA, le Conseil d’Etat, dans ses arrêts Pfizer holding et Michel Thierry de 2010 a précisé le régime de déduction de la TVA afférente aux frais exposés lors de la cession.
Pour le Conseil d’Etat :
– Les dépenses préparatoires à la cession sont présumées faire partie des frais généraux et sont déductibles. L’administration peut renverser cette présomption en faisant valoir que l’opération a un but patrimonial (cad que le produit de la cession a été distribué) ou que les dépenses ont été incorporées dans le prix de cession des titres.
– Les dépenses inhérentes à la cession sont présumées présenter un lien direct et immédiat avec l’opération de cession (et la TVA grevant ces dépenses non déductible), mais la société peut renverser cette présomption si elle établit que les dépenses n’ont pas été incorporées dans le prix de cession.
Dans le premier cas, la TVA bénéficie d’une présomption simple de déductibilité et l’administration fiscale peut rapporter la preuve contraire.
Dans le second cas, la TVA est présumée non déductible mais la société peut rapporter la preuve contraire et obtenir sa déduction.
S’agissant de la condition liée à l’incorporation des dépenses dans le prix de cession des titres, les décisions les plus récentes des juridictions administratives (notamment Tribunal administratif de Toulon du 12/11/2024) ont considéré que la simple mention dans l’acte « que les frais et coûts supportés n’ont pas été incorporés au prix de cession » n’est pas suffisante pour justifier du fait que les frais n’ont pas été incorporés au prix de cession. Pour les juridictions, il convient de produire d’autres documents (doc comptables) justifiant que les frais en question n’ont pas été incorporés dans le prix de cession.
Pour éviter toute remise en cause ultérieure des déductions de TVA, il appartient au Cédant de préparer les documents justifiant que la TVA n’a pas été incorporée au prix de cession.
La mention dans l’acte de cession que la TVA n’a pas été incorporée dans le prix de cession est une condition nécessaire mais pas suffisante. Cette absence d’incorporation devra être confirmée par la comptabilité de la société cédante.
Nous restons à votre disposition pour vous accompagner dans l’appréciation de la déduction fiscale de ces sommes et ainsi sécuriser votre situation.